Avsnitt

  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray consacre une séance entière à expliquer en détail le transcendantalisme, courant philosophique majeur du XIXe siècle américain, principalement incarné par Ralph Waldo Emerson et Henry David Thoreau. Onfray distingue ce mouvement de la philosophie matérialiste, en insistant sur ses fondements idéalistes, son rapport à la nature, à Dieu et à la construction de soi.

    2. Transcendance, transcendantal, transcendantalisme : distinctions

    Onfray commence par clarifier trois notions fondamentales :

    * La transcendance : toute idée qu’il existe un arrière-monde, une réalité supérieure au monde sensible (Platon, christianisme).

    * Le transcendantal (chez Kant) : ce qui rend possible la connaissance a priori, en dehors de l'expérience sensible.

    * Le transcendantalisme : courant philosophique proprement américain, inspiré par Emerson, qui défend l’existence d’un principe supérieur (la “surâme”), immanent à la nature, mais accessible par intuition, contemplation et vie intérieure.

    3. Les thèses du transcendantalisme selon Onfray

    Michel Onfray synthétise le transcendantalisme en sept grandes thèses :

    1. Affirmation de l’existence de DieuDieu n’est pas celui du christianisme anthropomorphe. Il est une force diffuse, présente dans la nature. Emerson parle de la “surâme”, principe universel immanent, comparable à un panthéisme.

    2. La connaissance par intuitionContre la raison mathématique, le transcendantalisme privilégie l'intuition, l'expérience sensible, le rêve, la folie, le sommeil, comme modes d'accès au réel.

    3. Mépris des masses, valorisation du génie individuelLe peuple est vu comme incapable d’accéder à la vérité. Seuls les grands hommes, figures d’exemplarité, quintessencient les forces éternelles du monde.

    4. Confiance absolue en soiMarqué par le protestantisme et la prédestination, Emerson invite chacun à obéir à son destin propre, à vivre selon sa nature, sans souci du jugement d’autrui.

    5. Non-conformisme radicalLe transcendantalisme défend le refus du conformisme social : peu importe les conventions, les institutions ou les normes, il s’agit d’être pleinement soi.

    6. Jouissance et contemplation de la natureLa contemplation de la nature est source de béatitude, d’extase païenne. La nature est divine et en elle réside la clé de la liberté intérieure.

    7. Construction de soi : souci et sculpture de soiLa priorité est donnée à la réforme individuelle plutôt qu’à la réforme politique. La transformation du monde passe par la transformation de soi.

    4. Emerson, un idéalisme américain

    Onfray souligne que le transcendantalisme d'Emerson repose sur une lecture idéalisme-platonicienne du monde. La nature n’est qu’un moyen d’accéder à une réalité supérieure. Emerson est un penseur de la transcendance, un dialecticien, théoricien éloigné de l’expérience directe.

    5. Thoreau : un transcendantalisme immanent

    Bien que souvent classé parmi les transcendantalistes, Thoreau s’en distingue nettement :

    * Il vit la nature comme une fin en soi, non comme un moyen d’accéder à un arrière-monde.

    * Il pratique un spinozisme concret, une mystique de l’immanence, où la nature est immédiatement sacrée.

    * Son engagement physique (marches, cabane, observation quotidienne) contraste avec l’approche plus théorique d’Emerson. Thoreau reste marqué par le transcendantalisme, mais s’en affranchit pour proposer une philosophie existentielle incarnée.

    6. Les dérives du transcendantalisme

    Onfray évoque les expériences qui ont dévoyé le transcendantalisme :

    * Universités transcendantalistes : libres, ouvertes, mais vite récupérées par des cercles mondains.

    * Expériences communautaires comme Brook Farm ou Fruitlands, qui mêlaient transcendantalisme, fouriérisme, végétarisme, rejet du capitalisme et du progrès, mais qui échouèrent rapidement.

    💡 Conclusion

    Le transcendantalisme, tel qu’exposé par Emerson, est un idéalisme religieux, panthéiste et individualiste, centré sur la confiance en soi, la contemplation de la nature et la construction intérieure. Thoreau s’en inspire mais lui préfère une radicalité plus pratique, tournée vers une mystique immanente et corporelle, loin des spéculations conceptuelles. Ce courant demeure une réponse critique à la montée du capitalisme, de l’industrialisation et du matérialisme.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Pythagore (env. 570-495 av. J.-C.) — Philosophe présocratique, influençant le dualisme platonicien.

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) — Philosophe grec, théoricien du monde des idées et du dualisme.

    * Plotin (env. 205-270) — Philosophe néoplatonicien, défenseur d’une mystique de l’intelligible.

    * René Descartes (1596-1650) — Philosophe français, défenseur du rationalisme mathématique.

    * Spinoza (1632-1677) — Philosophe rationaliste, père du panthéisme immanent.

    * Immanuel Kant (1724-1804) — Philosophe allemand, théoricien du transcendantal.

    * Arthur Schopenhauer (1788-1860) — Philosophe allemand, penseur du monde comme volonté et représentation.

    * Ralph Waldo Emerson (1803-1882) — Philosophe américain, principal représentant du transcendantalisme.

    * Margaret Fuller (1810-1850) — Figure américaine du transcendantalisme, féministe et écrivaine.

    * Henry David Thoreau (1817-1862) — Philosophe américain, figure de l’immanence transcendentaliste et du libertarisme.

    * Friedrich Nietzsche (1844-1900) — Philosophe allemand, proche de certaines thèses d’Emerson sur la confiance en soi et le dépassement.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode intitulé La cabane et la prison, Michel Onfray poursuit l’étude de Henry David Thoreau, en s’attardant sur les deux grandes expériences symboliques de sa vie : le séjour dans la cabane de Walden et son court passage en prison. Ces deux épisodes illustrent deux dimensions essentielles de sa philosophie : la quête d’autonomie individuelle et la désobéissance civile. Onfray déconstruit également certains mythes entourant Thoreau, tout en soulignant la portée révolutionnaire de son œuvre.

    2. La cabane : un laboratoire de vie autonome

    Onfray rappelle que l’expérience de Walden, loin du mythe du reclus permanent, dure deux ans et deux mois (1845-1847), avec des allers-retours fréquents à Concord. Cette cabane est construite par Thoreau lui-même, sur un terrain prêté par Emerson, avec des matériaux récupérés. Elle devient le symbole :

    * D’une vie simple, décroissante et autonome.

    * D’une volonté de réduire ses besoins, renouant avec les valeurs antiques de frugalité.

    * D’un espace pour penser, méditer, et expérimenter une existence fondée sur la liberté.

    Onfray souligne le lien entre cette cabane et les traditions monacales ou antiques, où l’espace réduit favorise la concentration sur l’essentiel.

    3. Un rapport sensoriel et mystique à la nature

    Thoreau développe une relation intime et poétique avec le lac de Walden, qu’il fantasme comme un être vivant, un absolu. Il y voit un lieu pur, préservé des péchés modernes (industrialisation, capitalisme), et se baigne quotidiennement dans ses eaux, perçues comme lustrales. Cette immersion sensorielle reflète son panthéisme païen, proche des philosophies orientales, rejetant toute transcendance chrétienne.

    4. La prison : naissance de la désobéissance civile

    Onfray revient sur l'épisode souvent surévalué de l’incarcération de Thoreau : une seule nuit, en 1846, pour avoir refusé de payer une taxe finançant la guerre contre le Mexique et l’esclavagisme. Thoreau voulait vivre l’expérience carcérale comme un acte politique et éthique :

    * Dire non à l’État, lorsque la conscience individuelle l’exige.

    * Défendre la primauté de l’individu et de la morale sur les lois injustes. Cet épisode donnera naissance à son texte majeur La désobéissance civile (1849), qui influencera de nombreux penseurs libertaires.

    5. De la vie éthique à l’engagement politique

    Après son séjour à Walden, Thoreau traverse une rupture existentielle. D’abord concentré sur son autonomie personnelle, il s’engage progressivement dans le combat abolitionniste, notamment après l’affaire Anthony Burns (un esclave capturé à Boston) et la rencontre avec John Brown, militant antiesclavagiste radical. Thoreau associe désormais éthique et politique, refusant toute loi qui contredit sa conscience morale.

    6. Une vie fondée sur la liberté radicale

    Onfray insiste sur la cohérence de la vie de Thoreau :

    * Refus du mariage, des attaches sociales, des biens superflus.

    * Pratique d’une ascèse existentielle, fondée sur l’autonomie, la simplicité, la réduction des besoins.

    * Refus des hiérarchies et de l’autorité, dans une logique proche de l’anarchisme, mais toujours enracinée dans la responsabilité individuelle.

    💡 Conclusion

    Thoreau incarne un modèle de liberté individuelle absolue, conjuguant une éthique personnelle rigoureuse et un engagement politique concret. La cabane de Walden et la prison deviennent les symboles complémentaires d’une philosophie de l’autonomie et de la désobéissance, où la quête du bonheur passe par la rupture avec les normes sociales oppressives. Son œuvre reste une référence pour les penseurs libertaires, écologistes et adeptes de la décroissance.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Diogène de Sinope (env. 412-323 av. J.-C.) — Philosophe cynique, défenseur d’une vie simple et libre.

    * Épicure (341-270 av. J.-C.) — Philosophe grec, partisan d’un hédonisme frugal et de la réduction des besoins.

    * Plotin (env. 205-270) — Philosophe néoplatonicien, inspirateur du transcendantalisme américain.

    * Étienne de La Boétie (1530-1563) — Philosophe français, auteur du Discours de la servitude volontaire.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, défenseur de la nature et de la liberté individuelle.

    * Ralph Waldo Emerson (1803-1882) — Philosophe américain, figure centrale du transcendantalisme, ami de Thoreau.

    * Henry David Thoreau (1817-1862) — Philosophe américain, auteur de Walden et de La désobéissance civile, pionnier de l’écologie et du libertarisme.

    * Friedrich Nietzsche (1844-1900) — Philosophe allemand, défenseur de la liberté individuelle radicale.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray inaugure l’étude approfondie de Henry David Thoreau, qu’il présente comme une figure essentielle des radicalités existentielles du XIXe siècle. Loin de se limiter à un simple littéraire ou naturaliste, Thoreau propose une philosophie de vie, ancrée dans l’expérience quotidienne, la nature, et la quête de liberté individuelle. Onfray en fait un précurseur de l’écologie, de la décroissance, et de la désobéissance civile, au travers d’une existence pensée comme une œuvre d’art.

    2. Une vie philosophique : existence et œuvre confondues

    Thoreau ne se contente pas de théoriser, il cherche à incarner sa philosophie. Son mode de vie est lui-même une réponse philosophique :

    * Il refuse les carcans sociaux, les conventions vestimentaires, les relations mondaines.

    * Il valorise l'autonomie matérielle (construction de sa propre maison, production de ses biens essentiels).

    * Il invite chacun à tracer son propre chemin, à bâtir sa vie selon ses propres valeurs, non en imitant mais en créant.

    Onfray montre que cette posture se rattache à une tradition où la vie philosophique prime sur le discours théorique (Diogène, Montaigne, Pascal).

    3. La nature comme école philosophique

    Thoreau naît à Concord, petit village de Nouvelle-Angleterre entouré de forêts, lacs et rivières. Ce cadre géographique marque profondément sa pensée :

    * La nature est pour lui une contre-culture, un espace de liberté et de vérité face aux dérives de la civilisation industrielle.

    * Il passe sa vie à herboriser, marcher, canoter, observant la nature dans ses moindres détails.

    * Son œuvre majeure, Walden, est à la fois autobiographie et biographie du réel naturel, célébration d’une vie simple et autonome.

    4. Fidélité à l’enfance : liberté, spontanéité, jeu

    Onfray insiste sur la fidélité de Thoreau aux valeurs de l’enfance :

    * Il conserve une capacité d’émerveillement, une liberté sans compromission.

    * Il critique les adultes, qu’il juge aliénés par la société de consommation, les conventions sociales et l’obsession de l’argent.

    * Thoreau célèbre la cabanisation, les promenades, les constructions, autant de gestes enfantins devenus philosophiques.

    5. Critique de la culture moderne et du progrès

    Thoreau rejette le culte du progrès, de la mécanisation, et du commerce :

    * Il dénonce l’arrivée du chemin de fer, symbole de l’accélération du temps et de la défiguration du paysage.

    * Il critique l’argent roi, les vêtements dictés par la mode, le théâtre mondain, les journalistes serviles.

    * Il oppose à cette société une vie décroissante, fondée sur le calme, la sobriété, la nature et la liberté individuelle.

    6. La philosophie orientale et l’influence brahmanique

    À partir de ses lectures des Upanishads, de la Bhagavad-Gîtâ et des Lois de Manu, Thoreau intègre une dimension spirituelle orientale :

    * Il rejette le dualisme chrétien corps/âme au profit d’une pensée immanente.

    * Il conçoit l’homme comme partie intégrante d’un tout naturel, fluide, changeant.

    * Onfray rapproche Thoreau d’un mysticisme païen, fondé sur la fusion avec la nature et le rejet de toute transcendance.

    7. Le journal et la construction du Moi

    Thoreau consigne ses réflexions dans un journal, véritable laboratoire philosophique où il note ses observations quotidiennes, ses expériences et ses pensées. Ce journal devient un outil pour construire son individualité, sans chercher à produire un système mais à incarner une existence authentique et libre.

    8. Concorde contre New York : critique de la civilisation

    Onfray montre comment Thoreau oppose :

    * Concorde, symbole de la nature, du temps lent, du local, de la liberté.

    * New York, symbole de la civilisation marchande, du progrès technologique, de la servitude volontaire.

    Thoreau fait ainsi l’éloge d’une vie simple et locale, en rupture avec les illusions du progrès moderne.

    💡 Conclusion

    Thoreau incarne une philosophie de vie radicale, refusant le conformisme social, le matérialisme et le progrès technique aveugle. Par son attachement à la nature, à la liberté individuelle, à l’enfance et à l’autonomie, il ouvre la voie à une pensée de la décroissance, de l’écologie et de la désobéissance civile. Sa vie même devient un manifeste philosophique, invitant chacun à construire son propre chemin hors des sentiers battus.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Héraclite (env. 544-480 av. J.-C.) — Philosophe présocratique, penseur du changement perpétuel.

    * Parménide (env. 515-450 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur de l'immobilité de l'être.

    * Diogène de Sinope (env. 412-323 av. J.-C.) — Philosophe cynique, défenseur d'une vie simple en harmonie avec la nature.

    * Étienne de La Boétie (1530-1563) — Philosophe français, auteur du Discours de la servitude volontaire.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, défenseur de la nature et de l’éducation.

    * Emmanuel Kant (1724-1804) — Philosophe allemand, auteur de la question « Qu’est-ce que l’homme ? ».

    * Arthur Schopenhauer (1788-1860) — Philosophe allemand, contemporain et influencé par la pensée orientale.

    * Ralph Waldo Emerson (1803-1882) — Philosophe américain, fondateur du transcendantalisme.

    * Henry David Thoreau (1817-1862) — Philosophe américain, auteur de Walden et de La désobéissance civile, figure majeure du transcendantalisme et du libertarisme.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans ce deuxième épisode de la saison 11, Michel Onfray poursuit son exploration des radicalités existentielles du XIXe siècle. Il se concentre ici sur deux figures majeures : Ludwig Feuerbach et Charles Darwin, qu’il considère comme les penseurs essentiels de la "mort de Dieu" et de la "naissance des hommes". Leur pensée permet de comprendre comment le XIXe siècle amorce la déconstruction du religieux et la construction d’un humanisme matérialiste.

    2. Ludwig Feuerbach : l’homme créateur de Dieu

    Onfray rappelle le rôle central de Feuerbach, souvent mal lu ou réduit à un simple précurseur de Marx. Son ouvrage majeur, L’essence du christianisme (1841), déconstruit le discours théologique en affirmant que :

    * Les hommes créent Dieu à leur image inversée.

    * La religion est une projection des désirs et limites humaines.

    * L'anthropologie est la clé pour comprendre la théologie : en étudiant l’homme, on comprend comment les dieux sont fabriqués.

    Feuerbach, initialement formé par l’hégélianisme, rompt avec Hegel pour adopter une position matérialiste, athée, et humaniste. Il dénonce la division entre âme et corps, et propose de réhabiliter l’homme réel, fini, sensible.

    3. La critique du dualisme chrétien

    Feuerbach rejette le dualisme corps/âme, essentiel au christianisme :

    * Le christianisme valorise l'âme éternelle, dénigrant le corps, siège de la matérialité.

    * Feuerbach défend une vision moniste : l’homme est un tout corporel et sensible.

    * Il propose une nouvelle morale : faire le bien pour l’amour de l’homme, sans Dieu ni transcendance.

    Il ouvre ainsi la voie à une pensée athée rigoureuse, qui s'oppose non seulement au christianisme, mais aussi à tout idéal transcendant.

    4. Charles Darwin : un homme parmi les animaux

    Darwin, avec L’origine des espèces (1859) et surtout La descendance de l’homme (1871), complète la déconstruction du religieux en montrant :

    * Il n’y a pas de différence de nature entre les hommes et les animaux, seulement une différence de degré.

    * Les hommes ne sont pas créés par Dieu, mais sont le fruit d’une évolution naturelle, sans dessein divin.

    * Le processus repose sur la sélection naturelle : les espèces les plus adaptées survivent.

    Darwin introduit ainsi une pensée immanente, où l’homme est pleinement inséré dans la nature, sans position privilégiée.

    5. L’éthique darwinienne : sympathie, amour et entraide

    Contrairement aux récupérations libérales (Herbert Spencer) qui voient dans Darwin une justification du "chacun pour soi", Darwin affirme :

    * L’homme est un animal social, doté d’instincts d’amour et de sympathie.

    * Le sens moral est inné et s’explique par les besoins de cohésion du groupe.

    * La morale est donc immanente, fondée sur l’utilité sociale, sans besoin d’un Dieu législateur.

    💡 Conclusion

    Feuerbach et Darwin incarnent une double révolution du XIXe siècle : la mort de Dieu et la naissance d’un homme post-chrétien, matérialiste, immanent et pleinement inséré dans la nature. Ils permettent de penser une morale sans transcendance, fondée sur l’amour, l’entraide et la solidarité. Ce tournant ouvre la voie aux radicalités existentielles qui marqueront la suite du siècle.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Démocrite (env. 460-370 av. J.-C.) — Philosophe grec, père du matérialisme atomiste.

    * Épicure (341-270 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur de l’ataraxie et de l’hédonisme.

    * Spinoza (1632-1677) — Philosophe rationaliste, penseur du panthéisme et du déterminisme.

    * Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) — Philosophe allemand, théoricien de l’idéalisme absolu.

    * Ludwig Feuerbach (1804-1872) — Philosophe allemand, penseur matérialiste, auteur de L’essence du christianisme.

    * Max Stirner (1806-1856) — Philosophe individualiste allemand, auteur de L’unique et sa propriété.

    * Bruno Bauer (1809-1882) — Philosophe allemand, critique de la réalité historique de Jésus.

    * Charles Darwin (1809-1882) — Naturaliste britannique, auteur de L’origine des espèces et La descendance de l’homme, père de la théorie de l’évolution.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du matérialisme historique.

    * Herbert Spencer (1820-1903) — Philosophe britannique, promoteur du darwinisme social.

    * Friedrich Nietzsche (1844-1900) — Philosophe allemand, célèbre pour l’annonce de la "mort de Dieu".

    * Sigmund Freud (1856-1939) — Neurologue autrichien, fondateur de la psychanalyse.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans ce premier épisode de la saison 11, Michel Onfray ouvre une nouvelle série consacrée aux radicalités existentielles du XIXe siècle. Après avoir exploré l'année précédente l'eudémonisme social, il présente cette fois une lecture du siècle sous l'angle du "Siècle du Moi", où la priorité n’est plus donnée à la transformation de la société, mais à la construction de soi. Ce parcours mettra en avant des figures telles que Thoreau, Schopenhauer ou Stirner, qui posent les fondements d’un individualisme assumé et radical.

    2. Deux lignes de force philosophiques du XIXe siècle

    Onfray distingue deux approches majeures :

    * L’eudémonisme social : centré sur la transformation collective du monde (Bentham, Owen, Fourier, Bakounine), cherchant le bonheur à travers le progrès social, économique ou politique.

    * Les radicalités existentielles : centrées sur l’individu, son existence, son éthique personnelle. Cette approche privilégie le travail sur soi, la construction d’une belle individualité avant toute transformation sociale.

    3. L’individualisme : entre héritage philosophique et concepts nouveaux

    Le terme individualisme apparaît en 1825 et prend racine dans la philosophie antique, notamment chez les matérialistes comme Démocrite. Onfray insiste sur la distinction entre :

    * Individualisme : l’idée que l’individu est souverain, au cœur de toute philosophie, et qu’il ne doit être aliéné ni par le collectif, ni par l’État.

    * Égoïsme : souvent condamné moralement, perçu comme le repli sur soi sans souci des autres.

    * Égotisme : terme popularisé par Stendhal, lié à l’exploration consciente de soi, à travers l’écriture, le journal intime ou les mémoires.

    4. Le journal : un laboratoire philosophique

    Le XIXe siècle est aussi le siècle du journal intime comme espace d’élaboration philosophique. Onfray cite plusieurs penseurs ayant pratiqué ce genre :

    * Thoreau, Emerson, Kierkegaard, qui en ont fait un outil quotidien de réflexion.

    * Maine de Biran, Schopenhauer, Léopardi ou encore Châteaubriand et Tocqueville.

    Le journal devient ainsi un chantier pour la construction de soi, un lieu d’examen de conscience sans arrière-fond religieux.

    5. La figure du dandy : une esthétique de soi

    Onfray consacre une part importante à définir le dandisme, non comme simple affectation vestimentaire, mais comme une éthique existentielle. Inspiré par Baudelaire, il montre que le dandy s’inscrit dans une posture de résistance face aux valeurs bourgeoises du XIXe siècle (progrès, vitesse, argent, matérialisme, démocratie de masse). Le dandy privilégie la lenteur, le loisir, la distinction, et fait de sa vie une œuvre d’art.

    6. Opposition antique et moderne : éthique ou politique prioritaire

    Onfray établit un parallèle entre :

    * Socrate : priorité donnée à l’éthique individuelle, au "connais-toi toi-même".

    * Platon : priorité à la construction d’un ordre social juste et hiérarchisé.

    Cette tension traverse tout le XIXe siècle et structure l’opposition entre les penseurs collectivistes (comme Marx) et les partisans de la radicalité existentielle.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray amorce ici un basculement du collectif vers l’individuel, en montrant que le XIXe siècle n’est pas seulement celui des grandes utopies sociales, mais aussi celui de l’affirmation du Moi. L’individu devient le centre des préoccupations philosophiques, à travers le journal, l’examen de conscience, le dandisme, ou encore les figures de Thoreau, Stirner ou Schopenhauer. Ce siècle ouvre la voie à une éthique du soi, où la vie peut être pensée comme une œuvre d’art, loin des injonctions sociales ou morales.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur du "connais-toi toi-même".

    * Démocrite (env. 460-370 av. J.-C.) — Philosophe matérialiste grec, fondateur de l’atomisme.

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) — Philosophe grec, auteur de La République, partisan d’une société hiérarchisée.

    * Marc Aurèle (121-180) — Empereur romain et philosophe stoïcien, auteur des Pensées pour moi-même.

    * Saint Augustin (354-430) — Philosophe chrétien, auteur des Confessions.

    * René Descartes (1596-1650) — Philosophe rationaliste français, auteur du Discours de la méthode.

    * Blaise Pascal (1623-1662) — Philosophe français, auteur des Pensées, critique du moi.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur des Confessions.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, théoricien du déterminisme social.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme.

    * Joseph de Maistre (1753-1821) — Philosophe contre-révolutionnaire, influence sur Baudelaire.

    * Robert Owen (1771-1858) — Réformateur social britannique, pionnier du socialisme réformiste.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, théoricien du phalanstère.

    * Arthur Schopenhauer (1788-1860) — Philosophe allemand, penseur du pessimisme.

    * Max Stirner (1806-1856) — Philosophe allemand, auteur de L'Unique et sa propriété, radicalement individualiste.

    * John Stuart Mill (1806-1873) — Philosophe britannique, défenseur d’un libéralisme social.

    * Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, défenseur du socialisme libertaire.

    * Henry David Thoreau (1817-1862) — Philosophe et écrivain américain, auteur de Walden, chantre de l’individualisme et de la nature.

    * Charles Baudelaire (1821-1867) — Poète français, théoricien du dandysme.

    * Walter Benjamin (1892-1940) — Philosophe allemand, auteur de L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique.

    * Pierre Hadot (1922-2010) — Philosophe français, spécialiste de la philosophie antique comme mode de vie.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray clôture le cycle consacré à la première partie du XIXe siècle en proposant une lecture des deux XIXe siècles. Il distingue deux temporalités philosophiques majeures : d’un côté, un siècle marqué par les utopies communautaires et les projets politiques visant à transformer la société ; de l’autre, une ère qui verra l’émergence de l’individualisme moderne. Ce bilan sert de transition vers la saison suivante, centrée sur les radicalités existentielles.

    2. Les dispositifs hédonistes : de l’Antiquité au XIXe siècle

    Onfray rappelle l’importance des dispositifs hédonistes dans l’histoire de la philosophie, lieux où s’incarnent des modes de vie philosophiques :

    * Le jardin d’Épicure.

    * Les béguinages du Moyen Âge.

    * Les salons libertins du XVIIIe siècle.

    * Les phalanstères fouriéristes, les communautés d’Owen, les cercles anarchistes.

    Ces dispositifs illustrent une philosophie qui vise à changer le monde pour atteindre le bonheur collectif.

    3. Le XIXe siècle de l’eudémonisme social

    Onfray décrit le XIXe siècle comme celui de l’démonisme social :

    * Les penseurs comme Godwin, Bentham, Stuart Mill, Owen, Fourier, Bakounine élaborent des projets pour améliorer les conditions sociales, économiques et politiques.

    * La Révolution française est vue comme une révolution libérale ayant profité aux propriétaires, et non aux classes populaires.

    * Le panoptique de Bentham devient une métaphore du contrôle social sous le libéralisme.

    4. Le Crystal Palace : métaphore de la transparence sociale

    Onfray s’attarde sur le Crystal Palace, symbole de la philosophie des Lumières :

    * Architecture transparente, abolissant la séparation entre intérieur et extérieur.

    * Métaphore d’une société de contrôle panoptique, où tout est visible et contrôlé.

    * Ce modèle sera récupéré par les nihilistes russes, les utopistes (Cabet, Tchernichewski) et critiqué par Dostoyevski, qui y voit la négation de l’homme libre.

    5. Les micro-communautés utopistes : succès et échecs

    Michel Onfray revient sur les expériences de communautés alternatives (Fourier, Owen, Cabet) :

    * Souvent vues comme des échecs, elles ont néanmoins produit des effets durables : coopératives, mutuelles, caisses de retraite, pédagogies alternatives.

    * Elles représentent une forme de micro-résistance, proposant des alternatives concrètes au capitalisme et à l’État autoritaire.

    6. Les acquis du socialisme réformiste

    Onfray dresse la liste des avancées issues de ces luttes et expérimentations :

    * Suffrage universel, réduction du temps de travail, éducation gratuite, santé publique, retraites.

    * Égalité homme-femme, suppression du travail des enfants, émancipation des colonies.

    * Ces acquis sont le fruit d’un combat mené par les socialistes, communistes, anarchistes et libéraux progressistes du XIXe siècle.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray conclut en montrant que le XIXe siècle fut le siècle du démonisme social, où le bonheur collectif prévalait sur l’individuel, via des dispositifs communautaires. Il annonce qu'il consacrera la saison suivante à l’autre XIXe siècle : celui des radicalités existentielles, où l’on assiste à la naissance de l’individu moderne, tourné vers la construction de soi et la quête d’une vie philosophique en dehors des grands projets collectivistes.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Diogène de Sinope (env. 412-323 av. J.-C.) — Philosophe cynique, défenseur d’une vie simple et libre.

    * Épicure (341-270 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur du jardin épicurien, prônant un hédonisme réfléchi.

    * Pierre Gassendi (1592-1655) — Philosophe libertin, défenseur du matérialisme épicurien.

    * René Descartes (1596-1650) — Philosophe rationaliste, auteur du Discours de la méthode.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste et utilitariste.

    * Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723-1789) — Philosophe matérialiste, auteur du Système de la nature.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme et du panoptique.

    * Robert Owen (1771-1858) — Réformateur social britannique, fondateur de communautés utopistes.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, théoricien du phalanstère et du socialisme harmonieux.

    * Étienne Cabet (1788-1856) — Philosophe utopiste français, auteur du Voyage en Icarie.

    * Auguste Comte (1798-1857) — Philosophe positiviste, influençant les nihilistes russes.

    * Auguste Blanqui (1805-1881) — Socialiste révolutionnaire français, défenseur du suffrage universel.

    * John Stuart Mill (1806-1873) — Philosophe britannique, défenseur du socialisme réformiste.

    * Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, défenseur du socialisme libertaire.

    * Ivan Tourgueniev (1818-1883) — Écrivain russe, auteur de Pères et Fils, créateur du personnage Bazarov.

    * Fiodor Dostoïevski (1821-1881) — Écrivain russe, critique des utopies socialistes, auteur de Souvenirs du sous-sol.

    * Nicolas Tchernychevski (1828-1889) — Philosophe et écrivain russe, auteur de Que faire ?.

    * Louise Michel (1830-1905) — Militante anarchiste et communarde.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray conclut son analyse de Michel Bakounine en le présentant comme l’incarnation d’un antimarxisme anarchiste. Opposé au socialisme autoritaire prôné par Marx, Bakounine défend un socialisme libertaire fondé sur l’autogestion, la suppression de l’État, la critique des hiérarchies et une confiance absolue dans la spontanéité du peuple.

    2. Anti-marxisme de gauche : l’anarchisme comme alternative

    Onfray montre qu’il est possible d’être anti-marxiste tout en étant de gauche, ce que Bakounine incarne pleinement. Il critique :

    * Le centralisme et l’autoritarisme du marxisme.

    * La dictature du prolétariat qui, selon lui, aboutit inévitablement à la création d’une nouvelle classe dominante.

    * L’idée marxiste d’avant-garde éclairée, qu’il oppose à une vision fédéraliste, horizontale et autogestionnaire.

    3. Deux visions opposées du socialisme

    Bakounine oppose deux formes de socialisme :

    * Le socialisme autoritaire d’État (Marx, Louis Blanc, Cabet), fondé sur l’organisation centralisée, la représentation, et le recours à l’État pour instaurer l’égalité.

    * Le socialisme libertaire positiviste (Bakounine, Proudhon), fondé sur la liberté individuelle, la destruction de l’État, la fédération des communes, et l’autogestion.

    4. Différences de tempérament : le dionysiaque contre l’apollinien

    Onfray insiste sur la divergence de tempérament entre Bakounine et Marx :

    * Marx : théoricien rigide, homme de cabinet, petit bourgeois allemand, préférant l’ordre, la planification, et les structures.

    * Bakounine : bohème révolutionnaire, révolté permanent, sanguin, empiriste, pragmatique, porté vers l’action directe et la spontanéité populaire.

    5. Critique de la dictature du prolétariat et du pouvoir

    Bakounine dénonce le concept même de dictature du prolétariat, soulignant qu’il conduira à la domination d’une minorité sur la majorité, et à l’émergence d’un nouvel État oppressif. Pour lui, le pouvoir corrompt absolument et doit être aboli sous toutes ses formes.

    6. Analyse des rapports de domination

    Bakounine développe une lecture des classes fondée non pas sur l’économie mais sur le rapport de pouvoir :

    * L’opposition est entre dominants et dominés, gouvernants et gouvernés, exploiteurs et exploités, quel que soit leur statut économique.

    * Il montre comment l’éducation, l’héritage, la religion et l’organisation sociale reproduisent ces rapports de domination.

    7. Une défense radicale du peuple

    Contrairement à Marx, qui méprise les paysans et le sous-prolétariat, Bakounine place sa confiance dans le peuple : les paysans, les chômeurs, les marginaux, les prisonniers. Il croit à la spontanéité révolutionnaire des masses, sans besoin d’organisation hiérarchique.

    8. Anticipation du totalitarisme et du fascisme

    Bakounine prédit qu’en maintenant l’État après la révolution, on ne fera que remplacer une oppression par une autre. Il anticipe les dérives totalitaires du XXe siècle et pressent que si la révolution échoue, l’alternative sera un État militaro-policier allié à l’Église pour préserver le capitalisme.

    9. Europe libertaire contre Europe libérale

    Bakounine défend l’idée d’une Europe fédérale libertaire, fondée sur des fédérations libres de communes et sans État central. Il propose une vision alternative à l’Europe libérale, toujours d’actualité.

    💡 Conclusion

    Michel Bakounine incarne une figure majeure du socialisme libertaire, opposée au centralisme marxiste. Sa critique radicale du pouvoir, sa défense de l’autogestion, du fédéralisme et de la spontanéité populaire, ainsi que son anticipation des dérives totalitaires, font de lui un penseur essentiel pour penser une alternative libertaire, égalitaire et réellement émancipatrice.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Diogène (env. 412-323 av. J.-C.) — Philosophe cynique, figure de l’insoumission.

    * Étienne de La Boétie (1530-1563) — Philosophe français, auteur du Discours de la servitude volontaire.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste et sensualiste.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, théoricien du phalanstère et du socialisme harmonieux.

    * Félicité de Lamennais (1782-1854) — Prêtre et philosophe chrétien socialiste.

    * Étienne Cabet (1788-1856) — Philosophe utopiste français, auteur du Voyage en Icarie.

    * Auguste Comte (1798-1857) — Philosophe positiviste, influençant Bakounine.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, critique de la propriété.

    * Louis Blanc (1811-1882) — Socialiste français, partisan d’un socialisme d’État.

    * Michel Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, figure centrale du socialisme libertaire et anti-marxiste.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du communisme autoritaire, opposé à Bakounine.

    * Pierre Kropotkine (1842-1921) — Philosophe anarchiste russe, continuateur du socialisme libertaire.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray approfondit la pensée de Michel Bakounine en s’arrêtant sur son éloge de Satan, symbole de rébellion et d’émancipation. Il montre comment Bakounine s’inscrit dans une tradition matérialiste, athée et libertaire, tout en développant une critique radicale des hiérarchies, du pouvoir, des religions et de l’État.

    2. Athéisme et matérialisme radical

    Bakounine reprend les thèses matérialistes héritées de Feuerbach et du XVIIIe siècle : Dieu n’est qu’une fiction créée par les hommes pour combler leur impuissance. Son athéisme n’est pas insultant ou blasphématoire comme chez Sade, mais découle d’une analyse rationnelle. Dieu représente l’oppression et la négation de la liberté humaine, d’où la nécessité de s’en débarrasser.

    3. Sensualisme et philosophie immanente

    Bakounine est un sensualiste, affirmant que seule la connaissance par les cinq sens est valable. Il rejette les idées platoniciennes d’un monde intelligible séparé. Sa philosophie est immanente, horizontale, sans transcendance : il refuse toute autorité venue d’en haut (État, Église, hiérarchie familiale).

    4. Socialisme libertaire et critique de l’État

    Bakounine défend un socialisme libertaire, fondé sur l’égalité, la justice sociale et la liberté, mais sans État. Il anticipe les dérives du socialisme autoritaire, incarné par Marx, qu’il accuse de reproduire les mécanismes de domination étatique. Bakounine privilégie les formes fédératives, mutualistes, contractuelles, construites à la base, par le peuple lui-même.

    5. Utilitarisme de gauche et conséquentialisme

    Michel Onfray insiste sur le fait que l’utilitarisme ne se limite pas au libéralisme. Bakounine développe un utilitarisme de gauche, où le bien est défini par les conséquences concrètes sur le bonheur collectif. Il adopte un conséquentialisme radical : la violence ou la révolution sont justifiées si elles permettent d'abolir l’exploitation et l’injustice.

    6. La figure de Satan : symbole de révolte

    Pour Bakounine, Satan incarne le premier révolté, l’ange déchu qui dit non à Dieu, à l’ordre établi et à la hiérarchie divine. Il devient le modèle du révolutionnaire, du porteur de lumière, du négateur des puissances aliénantes. Bakounine relie cette figure à l’idée que toute pensée libre, lucide et critique est nécessairement satanique, c’est-à-dire libératrice.

    7. Science et critique du scientisme

    Bakounine se méfie du scientisme, qui peut devenir un nouvel instrument d’oppression lorsqu’il renforce les hiérarchies. Il accepte la science quand elle contribue à la déconstruction des aliénations (Église, État, capitalisme), mais il privilégie le génie spontané du peuple et les micro-organisations sociales comme forces de transformation.

    💡 Conclusion

    Michel Bakounine incarne une pensée radicalement athée, matérialiste et libertaire, qui fait de la rébellion, de l'égalité et de l’autogestion les fondements de l’émancipation humaine. Son éloge de Satan symbolise la nécessité de dire non aux pouvoirs oppressifs, qu'ils soient religieux, politiques ou économiques. Sa critique du socialisme autoritaire et sa défense d’un socialisme libertaire, fédéraliste et anti-étatique en font une figure essentielle de la pensée anarchiste et révolutionnaire.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Démocrite (env. 460-370 av. J.-C.) — Philosophe grec, fondateur du matérialisme atomiste.

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) — Philosophe grec, théoricien du monde intelligible et des idées.

    * Épicure (341-270 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur d’un hédonisme modéré.

    * Denis Diderot (1713-1784) — Philosophe matérialiste français, co-auteur de l’Encyclopédie.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, théoricien de l’éducation.

    * Paul-Henri Thiry d’Holbach (1723-1789) — Philosophe matérialiste, auteur du Système de la nature.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme libéral.

    * Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) — Philosophe allemand, théoricien de la dialectique.

    * Ludwig Feuerbach (1804-1872) — Philosophe allemand, auteur de L'Essence du christianisme, critique des religions.

    * John Stuart Mill (1806-1873) — Philosophe britannique, défenseur du libéralisme humaniste et de l’utilitarisme qualitatif.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, auteur de Qu’est-ce que la propriété ?.

    * Michel Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, figure majeure du socialisme libertaire et révolutionnaire.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du communisme autoritaire, adversaire de Bakounine.

    * Pierre Kropotkine (1842-1921) — Philosophe anarchiste russe, théoricien de l’entraide.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray retrace la vie mouvementée de Michel Bakounine, figure centrale de l’anarchisme du XIXe siècle. Il met en lumière la trajectoire singulière de cet aristocrate russe devenu révolutionnaire professionnel, qui incarne un socialisme libertaire bohème, hédoniste et radical, en opposition au socialisme autoritaire incarné par Marx.

    2. Une jeunesse aristocratique et révoltée

    Né en 1814 dans une famille noble, Bakounine reçoit une éducation raffinée : polyglotte, violoniste, lecteur passionné. Mais il rejette très vite sa destinée militaire et aristocratique pour se tourner vers la philosophie, notamment l’idéalisme allemand. D’abord hégélien de droite, il adhère aux thèses de Hegel sur la coïncidence du réel et du rationnel, avant de basculer vers l’hégélianisme de gauche, plus athée, critique du christianisme et révolutionnaire.

    3. Rencontre avec les grands penseurs révolutionnaires

    Bakounine côtoie de nombreuses figures majeures du socialisme : Pierre-Joseph Proudhon, Karl Marx, Pierre Leroux, Victor Considérant, Étienne Cabet, Félicité de Lamennais, Michelet ou encore Louis Blanc. Sa pensée se forge dans ces cercles intellectuels, où il défend un socialisme libertaire, fédéraliste et anti-autoritaire, fondé sur la suppression de l’État.

    4. Un révolutionnaire professionnel, insaisissable et engagé

    Bakounine participe activement aux grandes insurrections européennes : Paris, Prague, Dresde, Lyon… Il est emprisonné, exilé en Sibérie, s’évade spectaculairement et poursuit son militantisme à travers l’Europe. Il mène une vie de bohème, sans attaches, vivant chez des amis, rejetant le travail salarié et subsistant grâce aux emprunts, dons et héritages espérés.

    5. Une philosophie hédoniste et libertaire

    Bakounine professe un hédonisme social : il dresse une échelle de plaisirs où figurent, par ordre :

    * Mourir en combattant pour la liberté.

    * L’amour et l’amitié.

    * Les sciences et les arts.

    * Les plaisirs sensuels (manger, boire, fumer, dormir).

    Il refuse les morales ascétiques, prône la jouissance de la vie, tout en restant fidèle à ses convictions révolutionnaires.

    6. Rupture avec Marx et destin du socialisme

    La rivalité avec Marx se cristallise lors des débats de la Première Internationale. Bakounine défend un socialisme libertaire, opposé au socialisme autoritaire de Marx, ce qui conduit à son éviction. Onfray souligne que cette opposition a scellé l’histoire du socialisme européen, orienté vers un modèle autoritaire, au détriment d’une voie libertaire incarnée par Bakounine.

    💡 Conclusion

    Michel Bakounine incarne une figure unique du XIXe siècle : aristocrate devenu révolutionnaire, philosophe libertaire, bohème hédoniste et militant infatigable. Sa critique radicale de l’État, du capitalisme, mais aussi des pouvoirs religieux et scientifiques, fait de lui un penseur toujours subversif. Sa vie entière, placée sous le signe de la liberté et du refus de toute autorité, propose une alternative libertaire au socialisme marxiste.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social.

    * Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) — Philosophe allemand, père de la dialectique et de l’idéalisme.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, théoricien du phalanstère et du socialisme harmonieux.

    * Félicité de Lamennais (1782-1854) — Prêtre et philosophe français, chrétien socialiste.

    * Étienne Cabet (1788-1856) — Philosophe utopiste français, auteur du Voyage en Icarie.

    * Pierre Leroux (1797-1871) — Philosophe français, inventeur du terme "socialisme".

    * Jules Michelet (1798-1874) — Historien français, auteur de L’Histoire de France.

    * Ludwig Feuerbach (1804-1872) — Philosophe allemand, auteur de L’Essence du christianisme, théoricien de l’athéisme humaniste.

    * David Friedrich Strauss (1808-1874) — Théologien allemand, auteur de La Vie de Jésus, critique de la divinité du Christ.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, théoricien du mutualisme.

    * Michel Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, figure majeure du socialisme libertaire et révolutionnaire du XIXe siècle.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du matérialisme historique et du communisme autoritaire.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray conclut son analyse de Charles Fourier en détaillant le concept de féérie sociétaire, un projet global qui vise à transformer la société en un espace harmonieux, joyeux, et sans répression des passions. Onfray montre comment Fourier entend réhabiliter toutes les passions humaines, refusant la morale ascétique dominante, pour construire une société où l’individu peut pleinement s’épanouir.

    2. Les passions : moteur de la société harmonieuse

    Fourier rompt radicalement avec la tradition philosophique occidentale qui diabolise les passions. Pour lui :

    * Toutes les passions sont bonnes par essence.

    * Le problème vient de leur mauvais usage en civilisation, qui génère frustration, sadisme, masochisme et névrose.

    * Il propose de les canaliser dans un cadre collectif joyeux et organisé : la féérie sociétaire.

    3. Féminisme avant l’heure : l’émancipation des femmes

    Fourier affirme que la manière dont une société traite les femmes révèle son niveau de civilisation. Il défend :

    * L’égalité totale entre hommes et femmes.

    * La libération des femmes du mariage, des maternités imposées et de la soumission domestique.

    * L’idée que l’émancipation de l’humanité passe par celle des femmes.

    4. Un utilitarisme hédoniste et conséquentialiste

    Influencé par Bentham, Fourier développe un utilitarisme singulier :

    * Une chose n’est bonne ou mauvaise qu’en fonction de ses conséquences concrètes sur le bonheur collectif.

    * Il propose d’intégrer toutes les passions (y compris sexuelles) dans la société, tant qu’elles augmentent le plaisir sans nuire à autrui.

    * Il refuse tout interdit moral rigide, au profit d’une morale du plaisir partagé.

    5. Le phalanstère : architecture de la féérie sociétaire

    Le phalanstère est l’espace où cette société idéale se réalise :

    * Communauté de 1800 personnes, organisée autour de séries d’activités multiples.

    * Architecture pensée pour satisfaire les passions : gastronomie, musique, amour, nature...

    * Chacun y cultive ses talents, variés, sans ennui ni division entre manuel et intellectuel.

    6. Réhabilitation du travail, des sens et des plaisirs

    Fourier défend :

    * Un travail ludique, varié, fondé sur la passion papillonnante.

    * L’éloge des cinq sens, y compris les plus méprisés (goût, toucher, olfaction).

    * La gastrosophie, qui unit plaisir culinaire, santé, culture et convivialité.

    7. Liberté sexuelle et pluralité des pratiques

    Fourier va très loin dans la défense de la liberté sexuelle :

    * Il légitime toutes les formes d’amour : fidélité, infidélité, polygamie, homosexualité, voyeurisme, fétichisme, etc.

    * Il propose des cérémonies amoureuses et festives, déculpabilisées, où chacun choisit librement ses partenaires.

    * La sexualité devient une passion positive, intégrée dans la société harmonieuse, loin des tabous et des névroses.

    💡 Conclusion

    Avec sa féérie sociétaire, Charles Fourier imagine une société où les passions humaines, loin d’être réprimées, deviennent la base d’une organisation joyeuse, égalitaire et épanouissante. En réhabilitant les plaisirs, les sens, les femmes, et les désirs multiples, il anticipe des thématiques aussi variées que l’écologie, le féminisme, l’éducation libertaire et la liberté sexuelle. Sa vision d’un bonheur collectif fondé sur l’émancipation des passions reste profondément subversive et moderne.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Spinoza (1632-1677) — Philosophe rationaliste, défenseur du panthéisme et des passions joyeuses.

    * Diderot (1713-1784) — Philosophe des Lumières, critique du dualisme corps/esprit.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme, influençant Fourier.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, théoricien du phalanstère, du socialisme harmonieux, féministe et libertaire avant l’heure.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, contemporain de Fourier.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du communisme, opposé à la voie réformiste de Fourier.

    * Sigmund Freud (1856-1939) — Psychanalyste autrichien, précurseur de l’analyse des pulsions, dont Fourier anticipe certains concepts.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray poursuit son étude approfondie de Charles Fourier, en insistant sur l’aspect métaphysique et cosmologique de sa pensée. Loin de se limiter à une doctrine économique ou sociale, Fourier développe une véritable gnose post-industrielle, où chaque élément du monde, des passions humaines aux planètes, obéit à des analogies et correspondances profondes. Onfray déchiffre cette pensée foisonnante et souvent jugée fantasque, révélant son lien avec le gnosticisme, le panthéisme et l'écologie avant l’heure.

    2. Un philosophe gothique : style et complexité de l'œuvre

    Fourier élabore son système dans un style baroque, marqué par :

    * Une abondance de néologismes (phalanstère, gastrosophie, papillonnante…).

    * Une prolifération de tableaux, schémas, chiffres et classifications détaillées.

    * L’usage de personnages conceptuels (comme Fakma dans son érotique). Onfray compare son œuvre aux châteaux de Louis II de Bavière : un monde exubérant, désordonné, où le lecteur doit décoder un langage propre.

    3. Gnosticisme et analogies : une cosmologie totalisante

    Fourier reprend certains éléments du gnosticisme ancien, tout en les réinterprétant :

    * Il postule une gnose, une connaissance cachée de l’univers, dont lui seul détient la clé.

    * Il élabore une théorie de l’analogie : tout dans le monde est lié, des comportements humains aux phénomènes cosmiques.

    * La copulation des planètes, l’importance des animaux (girafe, chardonneret), ou encore des végétaux, répondent à cette logique universelle.

    Son panthéisme repose sur l'idée que Dieu et le monde ne font qu’un, animés par une force unique : l’attraction passionnée.

    4. L’attraction passionnée : moteur divin et social

    Fourier conçoit l’attraction passionnée comme l’impulsion donnée par Dieu à l’univers :

    * Elle explique l’ordre du monde, depuis les passions humaines jusqu’à la mécanique céleste.

    * Elle légitime toutes les passions, aucune n’étant mauvaise en soi, seule leur civilisation (au sens négatif) les pervertit.

    * Elle annonce une société future, l’harmonie, où toutes les passions seront satisfaites librement.

    5. Une critique du capitalisme libéral et du productivisme

    Fourier dénonce le libéralisme économique, qu’il accuse de générer misère, aliénation et destruction. Selon lui :

    * Le commerce sans frein est immoral.

    * La pauvreté naît de l’abondance capitaliste.

    * La planète est menacée par l’industrialisme, bien avant les penseurs écologistes modernes.

    Il propose un modèle fondé sur les phalanges : des communautés autogérées, respectueuses des passions, des besoins réels et des ressources naturelles.

    6. Une pensée écologique avant l’heure

    Fourier anticipe des préoccupations écologistes majeures :

    * Déforestation, pollution, surconsommation des ressources.

    * Malbouffe et produits frelatés liés à la recherche du profit.

    * Déséquilibre des climats et dégradation de la planète.

    Il défend une société où l’économie respecte les cycles naturels et humains, critique les excès de productivité et prône une sobriété harmonieuse.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray révèle en Fourier un penseur bien plus qu’excentrique : un visionnaire gnostique, critique du capitalisme, précurseur de l’écologie, défenseur d’une société libre fondée sur la satisfaction des passions. Sa théorie de l’analogie et de l’attraction passionnée dessine un monde où l’humain et le cosmos sont liés, appelant à dépasser le productivisme pour renouer avec un ordre naturel, sensuel et juste.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) — Philosophe grec, mentionné comme personnage conceptuel chez Platon.

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) — Philosophe grec, référence indirecte via le platonisme des gnostiques.

    * Spinoza (1632-1677) — Philosophe rationaliste, défenseur d’un panthéisme proche de celui de Fourier.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, critique de la civilisation, influençant Fourier.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, défenseur de l’éducation et du déterminisme social.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme libéral critiqué par Fourier.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, inventeur du phalanstère, théoricien de l’harmonie et précurseur de l’écologie.

    * Schelling (1775-1854) — Philosophe allemand, cité par Fourier pour son idée de liaison universelle.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, critique de la propriété privée.

    * Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe, défenseur d’un socialisme anti-autoritaire.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du communisme, opposé à Fourier sur le rôle de la révolution.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray présente Charles Fourier, penseur inclassable du début du XIXe siècle, souvent relégué au rang d’excentrique en raison de ses propositions extravagantes. Pourtant, Onfray insiste sur la nécessité de dépasser les apparences pour découvrir la véritable pensée sociale, politique et cosmologique de Fourier, qu’il qualifie de gnostique licencieux, mêlant réformes concrètes et imaginaire poétique débridé.

    2. Un socialisme atypique : le refus des étiquettes

    Onfray critique l’étiquette habituelle de "socialiste utopique" accolée à Fourier. Selon lui, Fourier est difficile à classer : il propose un socialisme anti-autoritaire, sans révolution violente, refusant à la fois les systèmes marxistes et libéraux. Sa vision repose sur une transformation progressive et joyeuse du monde, par la mise en place de phalanstères, micro-communautés autogérées devant faire advenir une harmonie généralisée.

    3. Les extravagances assumées : cosmologie, sexualité et gastrosophie

    Fourier est célèbre pour ses propositions surprenantes :

    * Les planètes copulent, produisent des anti-animaux et anti-girafes.

    * Les humains auront un jour un archibras (troisième bras) et les habitants du Soleil disposeront d’une queue.

    * Il prône un Nouveau Monde amoureux, où toutes les pratiques sexuelles sont acceptées, abolissant les tabous, le mariage, les exclusions sociales et sexuelles.

    * Il invente la gastrosophie, une sagesse fondée sur le plaisir culinaire partagé.

    Mais derrière ces fantaisies se cache une réflexion sérieuse sur la libération des passions humaines et la critique de la répression morale issue du christianisme et du capitalisme.

    4. L’expérience personnelle au service d’un projet global

    Fourier élabore son système en réaction à ses propres expériences :

    * Issu d’un milieu commerçant, il rejette le capitalisme libéral, ayant constaté la spéculation, la misère et la destruction des ressources.

    * Sa critique du commerce et des intermédiaires vient de scènes vécues (comme la destruction d’une cargaison de riz à Marseille pour des raisons spéculatives).

    * Célibataire endurci et amateur de bordels, il transpose ses propres frustrations dans son projet de société harmonieuse, sensuelle et égalitaire.

    5. Critique de la Révolution française et des philosophes rationalistes

    Fourier se montre hostile à la Révolution française, qu’il associe à la terreur, à l’austérité républicaine et au moralisme ascétique. Il déteste Robespierre, l’être suprême, et les idéaux révolutionnaires abstraits. Il rejette également les philosophes des Lumières (Voltaire, Rousseau, Diderot), qu’il accuse d’être verbeux, idéalistes et coupés du réel. Pour lui, seuls comptent les penseurs concrets capables de transformer effectivement la société.

    💡 Conclusion

    Charles Fourier apparaît chez Onfray comme un philosophe inclassable et radical, défenseur d’une société fondée sur le plaisir, l’émancipation des passions et la coopération libre. Derrière son imaginaire foisonnant et ses extravagances cosmologiques se cache un projet sérieux : celui d’un monde sans exploitation, sans répression morale, et respectueux de la nature. Sa critique du capitalisme, son féminisme avant l’heure et sa vision écologiste font de lui une figure toujours pertinente.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, théoricien du déterminisme éducatif.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, père de l’utilitarisme libéral.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Philosophe français, inventeur du phalanstère et du socialisme libertaire, défenseur d’une société harmonieuse fondée sur les passions.

    * Auguste Comte (1798-1857) — Philosophe positiviste, fondateur du concept de sociologie.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, critique du capitalisme et du pouvoir étatique.

    * Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe allemand, théoricien du matérialisme historique.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray termine son exploration de la pensée de Robert Owen, figure clé du socialisme du XIXe siècle. Il met l’accent sur la vision optimiste d’Owen, fondée sur la possibilité d’améliorer les individus et la société par l’éducation, la justice sociale et la répartition équitable des richesses. Cette réflexion permet à Onfray d’exposer les grandes idées qui distinguent clairement la gauche de la droite.

    2. L’homme nouveau par l’éducation

    Owen, influencé par Rousseau et Helvétius, croit fermement que l’homme est façonné par l’éducation et que c’est en transformant les conditions sociales que l’on peut faire advenir un homme nouveau, libre et heureux. Il défend une pédagogie libertaire avant l’heure :

    * Scolarisation dès 2 ans, sans autorité ni châtiments.

    * Importance de l’apprentissage par la nature, les activités concrètes et l’absence de punition.

    * Refus du dogme religieux dans l’enseignement.

    3. La critique du libéralisme : justice contre charité

    Owen s’oppose fermement au libéralisme économique, qu’il accuse de générer la paupérisation :

    * Le capitalisme concentre les richesses, augmente la misère et favorise l’exploitation.

    * La charité chrétienne ne résout rien ; seule la justice sociale (meilleure répartition des richesses) permet de supprimer la pauvreté.

    4. Socialisme réformiste, non violent et pragmatique

    Contrairement aux marxistes révolutionnaires, Owen prône un socialisme réformiste, fondé sur :

    * La persuasion, la discussion, la diffusion d’idées (pas la violence).

    * La création de micro-communautés comme New Lanark, véritables laboratoires sociaux.

    * Le développement d’un système public garantissant l’éducation, l’emploi (via des grands travaux publics), la santé et la retraite pour tous.

    5. La politique comme éthique

    Owen ne sépare jamais politique et morale. Pour lui, la finalité de la politique est d’assurer le bonheur collectif. La prospérité d’une nation ne se mesure pas à la richesse accumulée, mais au bien-être effectif de ses citoyens.

    💡 Conclusion

    Robert Owen incarne un socialisme humaniste, optimiste et pragmatique, fondé sur l’éducation, la justice économique et la confiance en la perfectibilité humaine. Son rejet du libéralisme, sa foi dans la pédagogie, son militantisme pacifique et son projet d’une société harmonieuse font de lui une figure fondatrice du socialisme réformiste, toujours pertinente face aux inégalités contemporaines.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) — Philosophe grec, défenseur de la vertu et du questionnement éthique.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social et de L’Émile.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste, défenseur du déterminisme social par l’éducation.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme libéral.

    * William Godwin (1756-1836) — Philosophe anarchiste britannique, partisan de la réforme par la raison.

    * Robert Owen (1771-1858) — Entrepreneur et réformateur social britannique, fondateur du socialisme réformiste.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Socialiste utopiste français, promoteur des phalanstères.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe et économiste allemand, théoricien du communisme révolutionnaire.

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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray poursuit son analyse de Robert Owen, en abordant la dimension politique et sociale de son projet : l’idée d’une république libertaire universelle. Onfray insiste sur la nécessité de comprendre les notions de socialisme, communisme, ou anarchisme à l’époque d’Owen, au XIXe siècle, sans les anachronismes liés aux déformations du XXe siècle.

    2. Une République universelle : le bien commun à l’échelle planétaire

    Owen défend une vision de la République inspirée de la res publica romaine, fondée sur le bien public et l’intérêt général, sans nécessairement opposer monarchie et République. Sa nouveauté réside dans l’idée que cette révolution ne doit pas être locale mais universelle, visant à instaurer partout une organisation sociale plus juste.

    3. Un communisme agraire et progressif

    Owen ne suit ni Marx ni la logique industrielle dominante. Il propose un communisme agraire, reposant sur :

    * La nationalisation progressive du sol.

    * Une répartition égalitaire des biens.

    * L’organisation du territoire en petites communes fédérées. Son modèle privilégie la campagne et les producteurs agricoles, contre le culte de l'industrie.

    4. L’éducation, clé de la transformation sociale

    Fidèle à ses idées, Owen insiste sur une éducation communautaire des enfants, laïque et émancipatrice. Il croit fermement que l’éducation collective peut abolir l’inégalité, les préjugés, et façonner des individus libres, coopératifs et harmonieux.

    5. Trois piliers à abattre : propriété privée, religion, mariage

    Owen identifie trois institutions à abolir pour instaurer la justice sociale :

    * La propriété privée, source d’exploitation et d’inégalité.

    * La religion chrétienne, légitimant l’ordre établi, le pouvoir et la résignation.

    * Le mariage, qu’il considère comme une institution oppressive, responsable de frustrations, d’hypocrisie, et de reproduction des inégalités.

    Il propose une société où les liens sociaux et familiaux reposent sur le sentiment librement consenti et non sur des contraintes légales ou religieuses.

    6. Une pensée libertaire, anti-étatique et fédéraliste

    Owen prône la disparition des gouvernements centraux au profit d’une organisation fédérative, rejoignant les idées anarchistes avant l’heure. Il défend un modèle de société où les décisions se prennent à la base, par les communautés elles-mêmes, sans recours à un pouvoir extérieur.

    💡 Conclusion

    Robert Owen incarne un socialisme libertaire avant la lettre, combinant la critique du libéralisme, la remise en cause des institutions traditionnelles et la défense d’une société fondée sur l’égalité, l’éducation, et l’autogestion. Sa proposition d’une république universelle anticipe les idées anarchistes et socialistes fédéralistes, posant les bases d’un projet radicalement anti-autoritaire, humaniste et progressiste.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Abbé Meslier (1664-1729) — Prêtre et précurseur du communisme agraire.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) — Philosophe des Lumières, auteur du Contrat social.

    * Helvétius (1715-1771) — Philosophe matérialiste français, promoteur du déterminisme social.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, théoricien du libéralisme utilitariste.

    * Hegel (1770-1831) — Philosophe allemand, auteur de Principes de la philosophie du droit.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Socialiste utopique français, théoricien du phalanstère.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) — Philosophe anarchiste français, auteur de Qu’est-ce que la propriété ?.

    * Mikhaïl Bakounine (1814-1876) — Philosophe anarchiste russe.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe et économiste allemand, théoricien du matérialisme historique.

    * Simone de Beauvoir (1908-1986) — Philosophe et féministe française, autrice du Deuxième Sexe.

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  • 1. Introduction

    Dans cet épisode, Michel Onfray consacre son analyse à Robert Owen, qu’il présente comme l’un des premiers penseurs et praticiens du socialisme au XIXe siècle. Owen se distingue par son expérience concrète : il est à la fois entrepreneur capitaliste, réformateur social et théoricien socialiste. Onfray met en lumière l’originalité d’Owen, figure clé d’un socialisme réformiste, opposé aux excès du libéralisme économique et au communisme révolutionnaire.

    2. Un entrepreneur réformateur

    Owen commence sa carrière comme entrepreneur dans le secteur textile, dirigeant la grande filature de New Lanark. Très vite, il se démarque par une gestion innovante, cherchant à améliorer la condition des ouvriers tout en augmentant la rentabilité de l’entreprise. Il met en place :

    * Réduction du temps de travail (10h75 au lieu de 14-15 heures).

    * Interdiction du travail des enfants avant 10 ans, avec obligation qu’ils sachent lire, écrire, compter.

    * Logements décents, hôpital gratuit et épiceries sociales pour ses ouvriers.

    3. L’éducation et l’automatisme du bien

    Owen accorde une place centrale à l’éducation. Il invente une pédagogie fondée sur :

    * Une approche laïque et non religieuse.

    * L’idée que l’apprentissage doit se faire par le plaisir et la vie réelle, non par la contrainte.

    * Le principe du "fais à autrui ce que tu voudrais qu’il te fasse", visant à créer l’automatisme du bien dès le plus jeune âge.

    4. Socialisme réformiste et critique du libéralisme

    Owen s’oppose à la logique libérale dominante qui considère que le marché produit mécaniquement le bonheur général. Selon lui, le capitalisme entraîne surtout paupérisation, exploitation et déshumanisation. Mais contrairement à Marx, il pense que la transformation sociale peut venir par en haut, via des réformes menées par des dirigeants éclairés, et non par la révolution des masses.

    5. Expériences utopiques : New Harmony et limites

    Après avoir quitté New Lanark, Owen tente de créer des micro-sociétés communautaires aux États-Unis et en Angleterre (notamment New Harmony), espérant que ces modèles alternatifs se propageraient. Ces expériences échouent, révélant les limites d’une transformation par petites communautés sans prise sur les structures globales du pouvoir économique.

    💡 Conclusion

    Robert Owen incarne un socialisme humaniste et pragmatique, refusant à la fois le laisser-faire libéral et les révolutions violentes. Son projet repose sur une conviction forte : changer la société passe par l’éducation, la justice sociale et l’amélioration des conditions de vie concrètes. Par ses réformes avant-gardistes, il jette les bases d’une pensée socialiste réformiste encore actuelle, où la transformation passe par des actes, et non seulement par des théories.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Adam Smith (1723-1790) — Économiste écossais, théoricien du libéralisme et de la division du travail.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) — Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme.

    * Jean-Baptiste Say (1767-1832) — Économiste français, défenseur du libéralisme économique.

    * Robert Owen (1771 – 1858) — Industriel et réformateur social gallois, précurseur du socialisme utopique et du mouvement coopératif.

    * Charles Fourier (1772-1837) — Penseur utopiste français, promoteur des phalanstères.

    * Pierre Leroux (1797-1871) — Philosophe français, introduit le mot "socialisme" en France.

    * Flora Tristan (1803-1844) — Féministe et socialiste française, témoin des conditions ouvrières en Angleterre.

    * Karl Marx (1818-1883) — Philosophe et économiste allemand, théoricien du communisme.

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  • 1. Introduction

    Dans ce premier épisode de la saison 10, Michel Onfray poursuit son analyse approfondie de John Stuart Mill, en s'intéressant à son ouvrage majeur De la liberté. Il met en parallèle la pensée de Mill avec celle de Karl Marx, soulignant leurs visions radicalement opposées sur la transformation sociale : là où Marx prône la révolution économique et l'abolition du capitalisme, Mill préfère une réforme progressive, défendant un socialisme tempéré, fondé sur l’éducation, l’individualisme et la justice sociale.

    2. Stuart Mill face à Marx : réforme contre révolution

    Michel Onfray oppose la logique marxiste du changement radical par la lutte des classes et la dictature du prolétariat à la démarche réformiste de Mill. Selon Marx, le changement de l'infrastructure économique détermine la transformation des idées et des mœurs. Mill, en revanche, refuse cette vision mécanique. Il considère que l'individu, par éducation et développement personnel, peut être l'agent du progrès, sans passer par la révolution violente. Pour Mill, la justice sociale passe par la correction du libéralisme et non par son abolition.

    3. L’importance de l’individu : un antidote à la tyrannie de la majorité

    Mill constate une menace majeure dans la société moderne : la tyrannie de la majorité, renforcée par l’opinion publique, les médias (déjà puissants à l’époque) et l’uniformisation induite par le capitalisme et les nouvelles technologies (comme le chemin de fer). Il défend la nécessité de préserver des individualités fortes, capables de résister à cette standardisation. Ce souci rejoint l’idée du dandysme chez Baudelaire, qu'Onfray rapproche de Mill : cultiver sa singularité pour échapper à la vulgarité du temps.

    4. La liberté : droits et devoirs

    Mill affirme une définition rigoureuse de la liberté individuelle : chacun doit pouvoir faire ce qu’il veut tant qu'il ne nuit pas à autrui. Il insiste sur l’équilibre entre droits et devoirs, condition essentielle pour une société libre et juste. Sa défense absolue de la liberté de conscience, d’expression et d’action, tout en posant la limite du respect d’autrui, en fait un penseur à la croisée du libéralisme politique et du libertarisme, influençant également les courants anarchistes de son temps.

    5. Un socialisme tempéré et humaniste

    Contre l’image d’un Mill uniquement libéral, Onfray souligne ses positions clairement socialistes et réformistes :

    * Éducation pour tous, sans monopole étatique dogmatique.

    * Réformes démocratiques, suffrage universel incluant les femmes, véritable représentativité politique.

    * Rôle protecteur de l’État, garantissant une justice sociale et limitant les excès du capitalisme.

    * Redistribution des richesses, nationalisation du sous-sol, taxation des produits nuisibles, participation des travailleurs aux bénéfices.

    * Contrôle des naissances et défense des droits des femmes, culminant dans son ouvrage L’asservissement des femmes, où il prône une égalité totale.

    Pour Mill, le progrès social repose sur la combinaison d’une justice économique, d’une liberté individuelle préservée, et de l’éducation des consciences.

    💡 Conclusion

    John Stuart Mill développe une pensée singulière qui concilie liberté individuelle, justice sociale et réforme démocratique. Contre le libéralisme économique débridé et les solutions révolutionnaires radicales, il propose une voie intermédiaire : un socialisme tempéré, fondé sur l’éducation, la redistribution et le respect des libertés fondamentales. Son attachement à l’individu comme moteur du progrès, allié à une réflexion profonde sur les dangers de l’uniformisation, en fait un penseur toujours d’actualité.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) – Philosophe grec, théoricien du bien absolu.

    * Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) – Philosophe grec, symbole du questionnement éthique.

    * Épicure (341-270 av. J.-C.) – Philosophe grec, fondateur de l’hédonisme modéré.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) – Philosophe des Lumières, théoricien du contrat social.

    * Adam Smith (1723-1790) – Économiste écossais, figure du libéralisme économique.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, père de l’utilitarisme quantitatif.

    * Auguste Comte (1798-1857) – Philosophe positiviste, défenseur du progrès par la science.

    * Alexis de Tocqueville (1805-1859) – Philosophe et sociologue français, auteur de La Démocratie en Amérique.

    * John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe et économiste britannique, représentant majeur de l'utilitarisme et du libéralisme au XIXᵉ siècle.

    * Karl Marx (1818-1883) – Philosophe allemand, théoricien du communisme et du matérialisme historique.

    * Baudelaire (1821-1867) – Poète français, théoricien du dandysme.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray approfondit l’analyse de John Stuart Mill, en mettant en lumière les différences fondamentales entre son utilitarisme et celui de Bentham. Contrairement à une idée répandue, Mill ne se contente pas de prolonger la pensée de son prédécesseur ; il la corrige, la raffine et la transforme. Sa vision de l’hédonisme et de l’utilitarisme s’éloigne du simple calcul quantitatif du plaisir pour proposer un hédonisme qualitatif, plus soucieux de la dignité humaine, de l’éthique et de la justice sociale.

    2. L’opposition entre Bentham et Mill : quantité contre qualité

    Bentham conçoit l’hédonisme en termes quantitatifs : la morale se résume à maximiser le plaisir et minimiser la douleur, sans différenciation entre les plaisirs. Mill rejette cette approche et affirme qu’il existe des plaisirs supérieurs et inférieurs, basés sur leur valeur intellectuelle, morale et émotionnelle :

    * Bentham : "Tous les plaisirs se valent s’ils procurent la même intensité de satisfaction."

    * Mill : "Il vaut mieux être un homme insatisfait qu’un porc satisfait. Il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait."

    Cette hiérarchie des plaisirs introduit un critère de qualité : les plaisirs intellectuels (art, philosophie, musique, etc.) sont plus nobles que les plaisirs purement sensoriels.

    3. De l’égoïsme utilitariste à l’altruisme moral

    Une autre divergence majeure entre Mill et Bentham concerne l’éthique du plaisir :

    * Bentham : L’homme doit chercher son plaisir personnel en priorité, et l’addition des plaisirs individuels constituera le bonheur collectif.

    * Mill : Le bonheur ne peut être recherché directement ; il est une conséquence de l’altruisme. Ce n’est qu’en œuvrant pour le bien des autres qu’on trouve son propre bonheur.

    Cette approche fait de Mill un penseur moins égoïste et plus social. Il insiste sur l’importance de l’éducation morale, qui permet d’apprendre à rechercher des plaisirs élevés et à intégrer l’intérêt collectif dans ses choix.

    4. Un socialisme tempéré face au libéralisme radical

    Alors que Bentham reste attaché à une vision libérale stricte, Mill développe un "socialisme tempéré", qui n’exclut pas l’intervention de l’État pour garantir une répartition plus juste des richesses et des opportunités. Il défend :

    * Un État protecteur des individus contre les abus du capitalisme.

    * Une régulation du marché pour éviter l’exploitation des plus faibles.

    * Le droit de vote pour les femmes et les classes laborieuses.

    Ce positionnement lui vaut d’être récupéré par les libéraux, qui cherchent à minimiser son engagement socialiste, alors qu’il constitue une rupture claire avec l’individualisme pur de Bentham.

    5. L’utilitarisme sans Dieu : une éthique immanente

    Mill rejette toute justification religieuse de la morale. Contrairement aux doctrines chrétiennes qui fondent la morale sur un ordre divin, il pense que l’éthique repose sur une analyse rationnelle du bien et du mal, en fonction des conséquences des actions. Cette approche le rapproche du conséquentialisme, où :

    * Une action est bonne si elle produit plus de bonheur que de souffrance.

    * Une action est mauvaise si elle nuit au bien-être général.

    Cependant, Mill ne tombe pas dans un relativisme total : il maintient que certains principes (justice, liberté, équité) sont essentiels et universels.

    6. La critique de Bentham et la construction d’un utilitarisme humaniste

    Dans son Essai sur Bentham (1838), Mill critique sévèrement son prédécesseur :

    * Bentham néglige l’histoire et la culture : il ignore les apports des philosophes antérieurs.

    * Sa vision est trop mécanique : il réduit la morale à un simple calcul mathématique des plaisirs.

    * Il méconnaît la nature humaine : il suppose que tous les individus sont rationnels et recherchent spontanément leur intérêt bien compris, ce qui est faux.

    Mill construit alors un utilitarisme plus souple et plus adapté à la réalité humaine, qui prend en compte les sentiments, la culture et l’éducation.

    💡 Conclusion

    John Stuart Mill réinvente l’utilitarisme en le libérant de l’approche quantitative et mécanique de Bentham. Il affirme que tous les plaisirs ne se valent pas et introduit une hiérarchie des plaisirs, privilégiant les plaisirs intellectuels et moraux. Son utilitarisme devient altruiste et social, rejetant l’égoïsme benthamien au profit d’une recherche du bien collectif.

    Cette vision le rapproche d’un socialisme tempéré, où l’État joue un rôle de protection face aux excès du capitalisme. Son éthique, fondée sur la justice et la liberté, marque une rupture avec le libéralisme pur et ouvre la voie à un utilitarisme humaniste et progressiste.

    Loin d’être un simple héritier de Bentham, John Stuart Mill propose une transformation radicale de l’utilitarisme, en y intégrant des éléments d’altruisme, de justice sociale et de culture morale. Son œuvre marque ainsi une rupture avec le libéralisme pur et préfigure une vision plus humaniste et progressiste de l’éthique et de la politique.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) – Philosophe grec, défenseur du questionnement éthique et de la recherche de la vérité.

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) – Philosophe grec, théoricien du bien absolu et des idées supérieures.

    * Épicure (341-270 av. J.-C.) – Philosophe grec, fondateur de l’hédonisme modéré et du plaisir réfléchi.

    * Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) – Philosophe français, défenseur de la nature et de la souveraineté populaire.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, père de l’utilitarisme quantitatif.

    * Emmanuel Kant (1724-1804) – Philosophe allemand, défenseur de l’impératif catégorique et du devoir moral absolu.

    * John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe et économiste britannique, représentant majeur de l'utilitarisme et du libéralisme au XIXᵉ siècle.

    * Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) – Philosophe anarchiste français, critique du capitalisme et du libéralisme.

    * Karl Marx (1818-1883) – Philosophe et économiste allemand, théoricien du communisme.

    * Pierre Kropotkine (1842-1921) – Philosophe anarchiste russe, défenseur de la coopération et de l’entraide sociale.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Michel Onfray entame son analyse de John Stuart Mill, figure majeure du XIXe siècle, en s’intéressant à son autobiographie et à la manière dont sa pensée s’est construite dans un contexte familial rigide. Contrairement à ce que l’on croit souvent, Mill n’est pas un simple disciple de Bentham ni un pur défenseur du libéralisme. Il développe une pensée plus nuancée, qui se détache progressivement de l’utilitarisme orthodoxe pour intégrer une dimension romantique et humaniste.

    2. Une enfance sous le signe de l’excellence

    John Stuart Mill naît à Londres en 1806, fils de James Mill, philosophe et économiste utilitariste, proche de Jeremy Bentham. Son éducation est extrêmement stricte et précoce :

    * À 3 ans, il apprend le grec, puis le latin à 8 ans.

    * À 7 ans, il lit l’Iliade et les dialogues de Platon.

    * À 12 ans, il étudie la logique d’Aristote et la scolastique médiévale.

    Ce programme intensif, voulu par son père, vise à former un génie. Mill est tenu à l’écart des autres enfants et est totalement privé d’affection maternelle. Son quotidien est une alternance de lectures et d’exercices intellectuels, ce qui forge un cerveau exceptionnel, mais une personnalité rigide et isolée.

    3. Une adolescence marquée par l’influence de Bentham et de l’utilitarisme

    Adolescent, Mill est intégré aux cercles intellectuels de son père et de Bentham. Il est initié à l’économie politique, à la philosophie empiriste (Locke, Condillac, Helvétius) et à la logique. Il participe même à l’édition des œuvres de Bentham, contribuant à structurer la pensée utilitariste.

    Cependant, il commence à percevoir les limites de cette doctrine. Inspiré par Condorcet, il constate que l’utilitarisme benthamien est un système fermé, quasi sectaire, qui ne laisse pas place aux nuances et à l’individualité. Cette première fissure dans son adhésion totale au libéralisme va bientôt s’élargir.

    4. Une crise existentielle et la découverte du romantisme

    À 20 ans, Mill traverse une dépression nerveuse qui remet en question l’ensemble de son éducation et de ses certitudes philosophiques. La cause de cette crise est une révélation brutale :

    Si toutes les réformes que je désire étaient accomplies, serais-je heureux ? La réponse fut non.

    Il prend alors conscience que le bonheur ne se réduit pas à un calcul rationnel et qu’un système purement utilitariste ne peut suffire à combler une existence. Il se tourne alors vers la poésie romantique et la culture du sentiment :

    * La lecture de Wordsworth et d’autres poètes lui ouvre une nouvelle sensibilité.

    * Il découvre le sublime, cette émotion qui dépasse la raison pure.

    * Il comprend que l’art et la littérature sont essentiels à la vie humaine.

    Ce moment marque son émancipation progressive du benthamisme et le début d’une philosophie plus humaniste et sensible.

    5. La rencontre avec Harriet Taylor : une révolution intellectuelle et sentimentale

    En 1830, Mill rencontre Harriet Taylor, une femme mariée avec qui il noue une relation intellectuelle et amoureuse passionnée. Pendant 20 ans, leur relation reste platonique, mais elle transforme profondément la pensée de Mill :

    * Il s’intéresse au féminisme et à la question de l’égalité des sexes.

    * Il adopte une vision plus socialiste et critique du libéralisme.

    * Il rejette le calcul froid de l’utilitarisme pour une approche plus morale et humaine.

    Lorsque le mari d’Harriet meurt, Mill l’épouse en 1851. Leur collaboration influence ses écrits majeurs, notamment De la liberté (1859) et L’assujettissement des femmes (1869).

    6. Une philosophie politique entre libéralisme et socialisme

    Mill développe un socialisme tempéré, refusant à la fois le laissez-faire absolu du libéralisme et les excès du marxisme. Il prône :

    * Une régulation de l’économie pour éviter la misère générée par le capitalisme.

    * Un État garant des libertés, qui protège les individus sans étouffer leur initiative.

    * Un droit de vote élargi aux femmes et aux classes populaires.

    Élu député en 1865, il défend des causes progressistes, notamment l’abolition de l’esclavage et les droits des femmes. Sa pensée reste un compromis entre liberté individuelle et justice sociale, influencé par son héritage utilitariste mais enrichi par son évolution romantique.

    💡 Conclusion

    John Stuart Mill, bien loin d’être un simple disciple de Bentham, incarne une pensée plus complexe et nuancée. Son éducation rigide et son conditionnement intellectuel ont fait de lui un prodige précoce, mais aussi un homme profondément marqué par une crise existentielle qui l’a conduit à remettre en question l’utilitarisme orthodoxe.

    Son émancipation passe par la découverte du romantisme, de la poésie et de l’importance des sentiments, éléments absents chez Bentham. Sa rencontre avec Harriet Taylor joue un rôle déterminant dans sa transformation, l’amenant à développer un féminisme engagé et une approche du socialisme tempéré.

    Mill ne rejette pas l’utilitarisme mais le repense en intégrant une dimension humaine et altruiste, cherchant non plus un bonheur individuel immédiat, mais un idéal fondé sur l’amélioration de la condition collective et la justice sociale. Son engagement en faveur du suffrage universel, des droits des femmes et des classes laborieuses témoigne de son évolution vers une philosophie de la liberté équilibrée par des principes d’équité et de solidarité.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Saint Augustin (354-430) – Philosophe et théologien chrétien, auteur des Confessions, précurseur de l’autobiographie philosophique.

    * Michel de Montaigne (1533-1592) – Philosophe français, auteur des Essais, mettant en avant une réflexion introspective.

    * Blaise Pascal (1623-1662) – Philosophe et scientifique français, critique du moi et de l’orgueil humain.

    * John Locke (1632-1704) – Philosophe empiriste anglais, théoricien du libéralisme et de la connaissance par les sens.

    * Étienne Bonnot de Condillac (1715-1780) – Philosophe sensualiste français, influencé par Locke.

    * Claude-Adrien Helvétius (1715-1771) – Philosophe matérialiste et utilitariste, proche des Encyclopédistes.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme.

    * Jean-Baptiste Say (1767-1832) – Économiste français, défenseur du libéralisme économique.

    * William Wordsworth (1770-1850) – Poète romantique anglais, célébrant la nature et les émotions.

    * Auguste Comte (1798-1857) – Philosophe positiviste, influençant la pensée sociale de Mill.

    * John Stuart Mill (1806 – 1873) — Philosophe et économiste britannique, représentant majeur de l'utilitarisme et du libéralisme au XIXᵉ siècle.

    * Harriet Taylor Mill (1807-1858) – Féministe et intellectuelle anglaise, co-auteure de plusieurs idées de Mill.

    * Karl Marx (1818-1883) – Philosophe allemand, théoricien du communisme, opposé au capitalisme libéral.

    * Friedrich Nietzsche (1844-1900) – Philosophe allemand, critique des valeurs morales et du rationalisme.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence, Michel Onfray conclut son analyse de Jérémy Bentham en explorant les fondements du libéralisme économique et de son utopie. Il s’attache à démontrer que, contrairement à une idée reçue, le libéralisme repose autant sur une vision utopique du monde que le socialisme. À travers Bentham, il revient sur les origines du libéralisme moderne et ses implications philosophiques, politiques et sociales.

    2. Le libéralisme comme utopie

    Onfray remet en cause l’idée selon laquelle le libéralisme serait pragmatique et réaliste, tandis que le socialisme serait une pure construction intellectuelle déconnectée du réel. Il démontre que le libéralisme repose sur des présupposés philosophiques et théologiques, notamment l'idée que la main invisible du marché génère un ordre naturel. Cette croyance est analogue à une théodicée où le marché joue le rôle d’une instance régulatrice quasi divine.

    3. Bentham et la justification du libéralisme

    Bentham est un théoricien du bonheur collectif qui postule que l’augmentation de la richesse des nations profite inévitablement aux individus qui la composent. Son raisonnement repose sur un axiome contestable : l’enrichissement d’une nation entraînerait mécaniquement celui de ses habitants. Or, Onfray souligne qu’en réalité, le libéralisme engendre la paupérisation, un phénomène où la concentration des richesses au sommet s’accompagne d’une augmentation de la misère.

    4. L’économie libérale : un dogme et ses contradictions

    Le libéralisme de Bentham repose sur une série de principes intangibles, parmi lesquels :

    * La suppression des impôts et taxes pour favoriser l’économie.

    * La dérégulation des marchés et l’abolition des protections sociales.

    * La mise au travail de tous, y compris des femmes, enfants et invalides.

    * L’éloge de la consommation et du luxe, censés stimuler l’économie.

    * L’idée que le chômage est un phénomène passager, résolu par l’adaptabilité des travailleurs.

    Ces principes restent identiques aujourd’hui et illustrent l’utopie libérale, qui considère que le marché s’autorégule et conduit inéluctablement à une société harmonieuse. Onfray met en évidence l’influence de cette pensée sur les politiques économiques contemporaines.

    5. La paupérisation et la réponse libérale

    Contrairement à ce que prétendent les libéraux, l’essor du capitalisme ne réduit pas la pauvreté mais l’intensifie. Onfray rappelle que dans l’Angleterre du XIXe siècle, le libéralisme entraîne :

    * Le travail des enfants et des femmes dans des conditions inhumaines.

    * L’explosion de la prostitution et de l’alcoolisme.

    * Une pollution massive due à l’industrialisation sans contrôle.

    * Un accroissement des inégalités sociales et de la mortalité infantile.

    Face à cette situation, Bentham propose une solution disciplinaire et carcérale plutôt qu’une réponse sociale. Il suggère notamment :

    * Un fichage des pauvres et des sans-abris afin de les contrôler.

    * Un système de délation rémunérée, où les citoyens dénoncent les indigents aux autorités.

    * L’extension du modèle carcéral à la société entière, avec une surveillance généralisée.

    6. Le panoptique : contrôle et surveillance comme solutions

    Bentham conçoit le panoptique, une prison circulaire où un seul gardien peut surveiller tous les détenus sans être vu. Ce modèle devient un paradigme du contrôle social, appliqué non seulement aux prisons mais aussi aux écoles, aux usines et aux hôpitaux. Onfray souligne que cette logique de surveillance et de discipline, théorisée par Michel Foucault, est toujours à l’œuvre dans nos sociétés contemporaines.

    7. La critique des droits de l’homme

    Bentham s’oppose aux droits de l’homme et à l’égalité juridique, considérant que ces principes entravent la liberté du marché. Il critique notamment :

    * Le droit de résistance à l’oppression.

    * L’imprescriptibilité des libertés fondamentales.

    * L’idée d’une égalité naturelle entre les individus.

    Pour lui, la loi et l’État doivent être réduits au strict minimum, se limitant à la police, l’armée et la collecte des impôts nécessaires au maintien de l’ordre.

    💡 Conclusion

    John Stuart Mill s’éloigne du libéralisme absolu en montrant qu’il repose sur une vision utopique du marché, censé s’autoréguler naturellement. Contrairement à Bentham, qui défend un capitalisme sans entrave, Mill prône un État régulateur pour protéger les plus vulnérables et éviter la paupérisation.

    Son opposition au modèle disciplinaire de Bentham et sa critique du panoptique soulignent son attachement à la liberté et à la justice sociale. En intégrant une dimension morale et humaniste à son utilitarisme, Mill pose les bases d’un socialisme tempéré, conciliant progrès économique et protection sociale.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Adam Smith (1723-1790) – Économiste écossais, père du libéralisme économique et de la théorie de la main invisible.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, théoricien de l’utilitarisme et du panoptique.

    * Robert Owen (1771-1858) – Réformateur socialiste britannique, promoteur d’un socialisme coopératif.

    * Charles Fourier (1772-1837) – Penseur utopiste français, défenseur d’un modèle social alternatif.

    * Karl Marx (1818-1883) – Philosophe et économiste allemand, critique du capitalisme et théoricien du communisme.

    * Mikhaïl Bakounine (1814-1876) – Philosophe anarchiste russe, opposé au capitalisme et à l’autorité étatique.

    * Flora Tristan (1803-1844) – Féministe et socialiste française, témoin des conditions de vie ouvrières en Angleterre.

    * Michel Foucault (1926-1984) – Philosophe français, auteur de Surveiller et punir, analyse du panoptique et du contrôle social.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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  • 1. Introduction

    Dans cette conférence de l’Université populaire, Michel Onfray poursuit son exploration de l’utilitarisme en s’intéressant à la manière dont Jeremy Bentham conçoit la morale hédoniste. Plus précisément, il s’agit de voir comment Bentham propose d’évaluer le plaisir et la vertu à l’aide de critères mesurables, une approche qui repose sur le principe du "thermomètre moral".

    2. Bentham et la quantification du plaisir

    Bentham considère que le plaisir peut être évalué objectivement selon six critères : intensité, durée, certitude, étendue, fécondité et pureté. Cette approche mathématique du plaisir permet, selon lui, de déterminer ce qui est moralement souhaitable. Cependant, Onfray critique cette vision en soulignant l’imprécision de Bentham sur la définition même du plaisir, ainsi que les limites de son raisonnement subjectif.

    3. L’éthique conséquentialiste : une alternative au kantisme

    Contrairement à Kant et à la tradition philosophique qui postule des valeurs absolues, Bentham adopte une approche conséquentialiste : il n’existe pas de bien et de mal intrinsèques, seule compte l’évaluation des conséquences d’un acte en fonction de l’augmentation ou la diminution du plaisir global. Ce pragmatisme heurte les traditions dogmatiques (Platon, Aristote, le christianisme) et pose la question de la pertinence du calcul rationnel appliqué à la morale.

    4. La fabrication de la vertu : les quatre règles de Bentham

    Bentham identifie quatre principes permettant de construire une vertu morale :

    * La prudence personnelle, qui concerne la gestion de son propre plaisir.

    * La prudence extra-personnelle, qui régit les relations avec autrui.

    * La bienveillance effective négative, qui consiste à s’abstenir d’infliger du mal.

    * La bienveillance effective positive, qui consiste à générer du plaisir chez autrui.

    Onfray insiste sur l’importance du calcul dans cette éthique et critique l’idée que la bienveillance soit toujours récompensée en retour.

    5. L’anticolonialisme cynique de Bentham

    Bentham défend une position anticolonialiste non pas pour des raisons morales mais économiques : il considère que les colonies sont trop coûteuses à entretenir et qu’il vaut mieux s’en débarrasser pour favoriser la prospérité nationale. Cette posture utilitariste est mise en contraste avec celle de Condorcet, qui défend l’abolition de l’esclavage sur des bases républicaines et humanistes, mais dont la prudence politique retardera la mise en application.

    6. Dépénalisation de l’homosexualité : un raisonnement juridique

    Dans son "Essai sur la pédérastie" (1785), Bentham défend la dépénalisation de l’homosexualité, non par engagement progressiste, mais par refus des peines inutiles. Il argue que l’homosexualité ne nuit ni à la paix publique ni à la sécurité des individus et qu’elle contribue même à l’augmentation du plaisir global. Onfray souligne toutefois la confusion de Bentham entre homosexualité, bisexualité et pédérastie.

    7. Les droits des animaux et l’éthique utilitariste

    Bentham est l’un des premiers philosophes à inclure les animaux dans la réflexion morale, en affirmant qu’ils sont capables de plaisir et de souffrance. Il prône l’interdiction de la souffrance animale inutile, mais considère que leur mise à mort reste justifiable si elle est utile à l’homme. Son raisonnement influencera les penseurs modernes de la cause animale, notamment Peter Singer.

    💡 Conclusion

    Michel Onfray met en lumière la complexité et les contradictions de Bentham, partagé entre une éthique individualiste et une approche politique pragmatique. Loin d’être une pensée purement hédoniste, l’utilitarisme de Bentham se veut une tentative de rationalisation de la morale, qui repose toutefois sur des axiomes discutables. Son influence se retrouve dans des domaines variés, de l’abolition de l’esclavage à la question du droit des animaux.

    📚 Philosophes et concepts mentionnés

    * Platon (env. 428-348 av. J.-C.) – Philosophe grec, fondateur de la théorie des idées et défenseur du bien absolu.

    * Aristote (384-322 av. J.-C.) – Philosophe grec, précurseur de l’éthique de la vertu.

    * Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) – Philosophe grec, maître de Platon, partisan du questionnement éthique.

    * Emmanuel Kant (1724-1804) – Philosophe allemand, théoricien de l’impératif catégorique et du devoir moral absolu.

    * Jeremy Bentham (1748-1832) – Philosophe britannique, fondateur de l’utilitarisme et du panoptique.

    * Marcel Mauss (1872-1950) – Sociologue français, auteur de L’Essai sur le don, influençant la réflexion sur les échanges sociaux.

    * Peter Singer (né en 1946) – Philosophe australien, promoteur du droit des animaux et de l’éthique utilitariste moderne.

    Crédits : Michel Onfray et la Contre-histoire de la philosophie



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